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Guerre d'Espagne (1936-1939)
Texte
Ressource textuelle
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C’était l’heure du courrier; d’après le libellé des adresses, j’augurais des approbations ou des injures. Un jeune homme m’écrivait: “... La justice du général Franco, je l’espère, frappera sans faiblesse et aussi sans vaine cruauté les responsables basques, au moins ceux qui n’auront pas fui. J’espère qu’il sera inexorable pour les prêtres et pour les civils…” Impossible d’aller plus avant: de toutes les sortes de férocités, celle qui naît de la niaiserie est la moins supportable.
Pour reprendre haleine, j’ouvris alors Le Figaro, et d’abord ce titre me sauta aux yeux: Une démarche du Vatican auprès du général Franco. Suivait la dépêche officielle de la Cité du Vatican, datée du 24 juin: “Le cardinal, secrétaire d’État Eugenio Pacelli a télégraphié au nom du Pape à l’Archevêque de Tolède, représentant officieux du Saint-Siège auprès du gouvernement de Burgos, le chargeant d’intervenir auprès du général Franco pour que celui-ci apporte la plus grande modération dans les opérations militaires du secteur de Biscaye, où il se trouve en présence d’une population et d’un clergé catholiques. Cette initiative n’est pas le résultat de la réunion de la Congrégation des affaires ecclésiastiques extraordinaires qui s’est tenue dimanche dernier. Elle a été prise à la suite d’une intervention de personnalités politiques françaises”. Ces dernières lignes, d’une charité toute gratuite, expriment ce que S. É. le cardinal Pacelli a dans le cœur pour ses amis de France.
On nous avait dit: “Le Pape n’a pas besoin que vous lui dictiez sa conduite…” Nous n’avions pas eu non plus cette pensée ridicule, mais il n’est pas défendu de prier en vue d’une grâce temporelle. Nous avions crié vers notre Père, en acceptant d’avance de n’être pas exaucés, visiblement. D’autres se moquaient: “Le Pape fait la sourde oreille…”, écrivait l’Œuvre. Et tout à coup, cette réponse si prompte, si pleine de miséricorde! Nous avions frappé à la porte et elle s’ouvrait. Nous ressentîmes alors l’émerveillement étonné des hommes de peu de foi…
Quelle sera l’attitude du vainqueur? Rien n’a transpiré encore des mesures arrêtées à l’égard des adversaires, prêtres ou fidèles, tombés entre ses mains. Les manifestes publiés avant la prise de la ville ne rassurent parce qu’ils se ramènent tous au mot terrible du plus fort, pour qui la résistance est un crime: “Que les bons se rassurent et que les méchants tremblent!”
Où sont les bons? Où sont les méchants? Tous les uns à gauche et tous les autres à droite comme au dernier jugement? Nous ne le pensons pas…
Et nous ne faisons pas au général Franco l’injure de le croire incapable d’une discrimination éclairée par la prière. Du moins, les Basques savent-ils aujourd’hui qu’ils ne sont pas traités en fils réprouvés, qu’ils ont toujours leur place à la table du père de famille et qu’aucun de leurs frères n’a le droit de les en chasser sous prétexte qu’ils sont responsables de leur malheur. Cette responsabilité, après avoir lu le livre de Bernoville, je l’admettais en partie au moment où dans Le Figaro je plaidais pour eux; mais des témoignages qui m’arrivent depuis une semaine éclairent le drame basque d’une lumière nouvelle. Et sans doute, il importe de les discuter, de s’informer. Le jour où nous connaîtrons toute la vérité, nous la dirons.
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Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1937-07-02
Title
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Le Père a répondu
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Sept
Identifier
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MEL_0805
Source
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4e année, n°175, p.2
Type
The nature or genre of the resource
Billet
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
François MAURIAC
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<a href="http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328675548/PUBLIC" target="_blank">Notice bibliographique BnF</a>
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The file format, physical medium, or dimensions of the resource
Pdf
Microfilm
Language
A language of the resource
Français
Subject
The topic of the resource
guerre d'Espagne, peuple basque, papauté
Description
An account of the resource
Au moment où il est lassé par les injures qu'il reçoit pour ses prises de position, François Mauriac a la fierté de lire que la démarche qu'il a faite en faveur des Basques auprès du Pape a abouti à ce que celui-ci recommande la clémence au général Franco. Il souhaite que les Basques puissent rester dans la famille catholique.
guerre d'Espagne
papauté
Peuple basque
-
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Title
A name given to the resource
Guerre d'Espagne (1936-1939)
Texte
Ressource textuelle
Text
Any textual data included in the document
Je voudrais ici rapprocher un petit effet d’une grande cause. Si j’ai signé ce manifeste à propos du bombardement de Guernica, ce ne fut pas sans balancer: Pourquoi ne protester que contre les atrocités d’un des partis aux prises? Le crime, en Espagne, est-il d’un seul côté? Trouverait-on un seul exemple d’un manifeste de gauche contre les assassinats, les viols et les sacrilèges de Barcelone et d’ailleurs?
J’ai pourtant signé et j’en donne ici la raison: autour de ce peuple basque profondément catholique, et aujourd’hui atteint aux sources mêmes de sa vie, dans ses enfants, s’empressent des communistes et des Anglicans. Il cherche, il appelle ses frères dans le Christ et ne les trouve pas. Il est bien temps de se demander s’il a mérité son malheur ou si on lui peut trouver quelque excuse! C’est ici que j’avoue ne pas comprendre la position du plus grand de nos maîtres. Même si les raisons qui ont fixé le choix du peuple basque n’étaient point de celles qui échappent en partie aux étrangers, nous n’avons qu’un droit qui se confond avec un devoir: nous pencher sur ses blessures. Pour le reste, Dieu seul est juge.
A un être gisant, accablé de coups, nous devons épargner les il fallait et les pourquoi. En ces jours de la fête du Corps du Christ, nous nous rappelons que lorsqu’un membre de ce corps est souffrant, tous les autres souffrent. Il ne faut pas que le jour où ce peuple basque s’éveillera de son cauchemar, il puisse attester que seuls les ennemis mortels de l’Eglise l’ont secouru; il ne faut pas qu’à ses yeux le prêtre, le pharisien qui passent sans tourner la tête soient des catholiques; ni qu’on lui fasse croire que sur le turban du Bon Samaritain, il y a un marteau et une faucille.
Voilà ce qui m’a décidé. J’ai souffert de sembler apporter de l’eau, ou plutôt du sang, au moulin communiste, de paraître fournir des armes aux hommes qui, depuis vingt ans, en Russie, ont montré le cas qu’ils faisaient de la vie humaine, eux qui en fait de crimes n’ont de leçon à recevoir de personne.
Mais un peuple chrétien gît dans le fossé, couvert de plaies. Devant son malheur, ce n’est pas faire le jeu du marxisme que de manifester au monde la profonde unité catholique. Voici le cep et voici les pampres. L’un des rameaux est menacé de périr et toute la vigne souffre.
Enfin, de quelque côté que nous penchions dans cette guerre atroce, quelles que soient nos préférences, il ne semble pas que les catholiques soient libres de ne pas désirer une médiation; et c’est pourquoi j’ai accepté d’adhérer au Comité fondé à ce propos par Jacques Maritain. A une de nos réunions, Madaule, dont on sait que le cœur est à gauche et tous les vœux pour Madrid disait: “Chacun de nous doit se faire violence pour ne pas souhaiter l’écrasement du parti qu’il déteste.” Et je sentais bien, et j’admirais toute sa volonté tendue dans un effort que Dieu voyait. Et ce que Dieu voyait aussi ce soir-là, c’était tous ces chrétiens venus d’horizons opposés et qui pourtant n’avaient qu’un cœur: “Partout où sera le corps, là s’assembleront les aigles.”
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Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1937-05-28
Title
A name given to the resource
Le membre souffrant
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Sept
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
MEL_0804
Source
A related resource from which the described resource is derived
4e année, n°170, p.2
Type
The nature or genre of the resource
Billet
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
François MAURIAC
Relation
A related resource
<a href="http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328675548/PUBLIC" target="_blank">Notice bibliographique BnF<br /></a>Repris p.81-82, in <em>Mémoires politiques</em>, Paris : Grasset, 1967.<br />Repris p. 216, in <em>La Vague et le rocher : Paul Claudel-François Mauriac, correspondance 1911-1954</em>, Paris : Lettres Modernes Minard, 1988.
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
Pdf
Microfilm
Language
A language of the resource
Français
Description
An account of the resource
François Mauriac justifie sa signature donnée au manifeste à propos du bombardement de Guernica par la nécessaire solidarité avec tous les chrétiens du vaste ensemble catholique.
Subject
The topic of the resource
Front populaire, guerre d'Espagne, christianisme, solidarité, peuple basque
christianisme
Front populaire
guerre d'Espagne
Peuple basque
Solidarité
-
https://mauriac-en-ligne.huma-num.fr/files/original/d7eb4b8934618eb4a455af55d4847fcf.pdf
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Title
A name given to the resource
Guerre d'Espagne (1936-1939)
Texte
Ressource textuelle
Text
Any textual data included in the document
Nous vivons dans des temps où la victime du moment fait oublier la victime de la veille, où un crime chasse l’autre. Il faut que nous sachions garder fidélité à une cause même si elle n’est plus à l’ordre du jour. On ne parle plus beaucoup des Basques depuis quelque temps. Il n’empêche que le problème basque demeure posé, et qu’il reste actuel, tant que l’Espagne n’aura pas retrouvé la paix.
Aujourd’hui, nous pouvons affirmer que dans l’univers catholique, et d’abord en France, les Basques ont gagné la partie devant l’opinion. Nous ne nous serons pas battus pour rien, et les injures reçues ne pèsent guère devant le résultat obtenu. Ces jours derniers, à une première réunion pour constituer le Comité international d’amis des Basques, la présence de l’archevêque de Paris, de l’évêque de Dax et d’autres personnalités dont il ne nous appartient pas encore de donner le nom, témoignait que la fraternité catholique, longtemps hésitante à cause de tant de calomnies répandues, s’affirme maintenant sans réticences en faveur des amis fidèles que possède la France sur la frontière des Pyrénées.
Durant les dernières vacances, en première page d’un grand quotidien modéré comme La Petite Gironde, une enquête très favorable aux Basques, de M. Pierre Dumas, a pu paraître durant plusieurs jours sans soulever de protestations. D’un certain nombre d’erreurs, qui naguère encore couraient la presse française, aucun journal n’ose plus aujourd’hui se faire l’écho.
Personne n’ignore plus en France qu’avant la guerre civile, non seulement aucune alliance n’existait entre les catholiques basques et les communistes, mais que, sur le terrain électoral comme sur celui des œuvres sociales, ils demeuraient des adversaires irréductibles. Attaqués par les rebelles, dès le premier jour, les Basques se sont trouvés à leur corps défendant au côté des gauches espagnols, de même qu’en septembre, une agression de l’Allemagne nous aurait placés, avec l’Angleterre conservatrice, dans le même camp que les Soviets.
Aucun catholique n’ignore plus que l’obéissance au pouvoir établi, au pouvoir légal, fût-il le pire, demeure la règle de l’Église, et que seule la passion politique pouvait faire un crime aux catholiques basques d’avoir refusé de se révolter. Même si l’on considère que l’état intérieur de l’Espagne rendait légitime le soulèvement militaire et l’appel à l’étranger, même dans cette hypothèse, aucune loi divine ni humaine n’obligeait en conscience les Basques à prendre parti contre le gouvernement officiel de Madrid auprès duquel étaient accrédités les ambassadeurs du monde entier. Les rebelles, et non les fidèles, ont à se défendre et à présenter leurs arguments. Nous admettons que ces arguments méritent d’être considérés. Mais ce que nous n’admettons pas, c’est que les Basques aient commis un crime en voulant demeurer hors du conflit.
D’ailleurs, par quel miracle eussent-ils pu se résoudre à soutenir les ennemis de leurs libertés? Au moment d’obtenir de la République l’autonomie dans le cadre de la nation espagnole, leurs aspirations allaient être satisfaites. Il était inhumain d’attendre d’eux et stupide d’espérer qu’ils mettraient leurs forces au service de ceux qui souhaitent d’anéantir ces libertés auxquelles ils tiennent plus qu’à leur vie. Aucun Français raisonnable ne croit plus aujourd’hui qu’on pouvait raisonnablement attendre d’eux une telle attitude. Pas plus d’un peuple que d’un individu, nous ne saurions exiger qu’il se trahisse lui-même.
Et sans doute on objectera qu’ils ont tout perdu, qu’ils ont été écrasés. Défaite qui n’est qu’apparente. Les Basques l’ont tout de même emporté. Ils ne furent jamais si près de la victoire. Le gouvernement d’Euzkadi réside à Paris et ce n’est pas un gouvernement fantôme car il s’occupe des milliers et des milliers de Basques de tout âge et de toutes conditions qui ont franchi les frontières; il veille sur des milliers d’enfants.
Des amitiés fidèles les entourent dans le monde entier. La hiérarchie catholique, un moment influencée par les manifestes passionnés d’une partie de l’épiscopat espagnol trop engagé dans la guerre civile, ne traite plus son peuple fidèle en suspect. Nous savons que le Père commun les porte aujourd’hui dans son cœur et que l’archevêque de Paris se tient à leurs côtés. Quelle que soit l’issue de la guerre civile, personne ne doute plus que le vainqueur ne fondera rien de durable sans rendre aux Basques leurs libertés. Quant à nous, nous sommes assuré qu’en soutenant cette cause, c’est la France que nous avons servie. Elle a besoin, sa sécurité exige que sur la frontière des Pyrénées les forces allemandes et italiennes, plus ou moins camouflées, cèdent la place aux possesseurs légitimes, dont les frères sont Français –peuple petit, sans doute, mais tout de même le plus fort de l’Espagne, le plus pur de race, le plus riche non seulement en esprit, mais aussi matériellement: l’Euzkadi produisait, à la veille de la guerre civile, soixante pour cent du fer de la Péninsule; il frétait la moitié des bateaux battant pavillon espagnol, il fournissait plus d’un quart des comptes courants de la Banque d’Espagne.
L’Église basque dirigée par un clergé social dévoué aux œuvres populaires, opposait au communisme cette justice, cette charité, cet amour qui sont les seules armes efficaces du chrétien. Nous sommes en droit d’affirmer aujourd’hui que c’est dans la mesure exacte où les provinces basques auront reconquis leurs libertés que l’Espagne retrouvera la paix véritable. Ces libertés seront la pierre de touche d’un bon gouvernement, de même que leur suppression serait le signe d’un pays livré à la force, c’est-à-dire condamné à de nouvelles et interminables convulsions. Le rétablissement de l’Euzkadi dans ses droits marquera enfin l’entrée de l’Espagne dans la paix.
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Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1938-12-30
Title
A name given to the resource
La Victoire des Basques
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Paris-Soir
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MEL_0595
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<a href="http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34519208g" target="_blank">Notice bibliographique BnF</a>
Source
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16e année, n°6012, p.2
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
François MAURIAC
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
Pdf
Language
A language of the resource
Français
Subject
The topic of the resource
guerre d’Espagne, peuple basque, Espagne, catholicisme social, communisme
Description
An account of the resource
François Mauriac prend du recul sur la défaite militaire des Basques pour relever leur victoire dans l’opinion publique. Il apparaît que leur refus de se soulever contre le gouvernement républicain était justifié par la promesse que leurs libertés allaient être reconnues. Il appuie le gouvernement basque en exil à Paris, ainsi que le clergé basque dont les idées sociales étaient un rempart contre le communisme. Pour lui, la paix en Espagne ne s’établira que lorsque les Basques auront récupérés leurs droits.
Type
The nature or genre of the resource
Chronique
catholicisme social
communisme
Espagne
guerre d'Espagne
Peuple basque
-
https://mauriac-en-ligne.huma-num.fr/files/original/4850921f9896bd52da55ce761730b187.pdf
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Title
A name given to the resource
Guerre d'Espagne (1936-1939)
Texte
Ressource textuelle
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Les orphelins de Guernica, de Durango, de Barcelone ne peuvent pas confondre la cause de leur Dieu crucifié avec celle du général Franco
Le silence s’est fait sur le peuple basque. L’attention s’est détournée de lui. Il existe tant d’autres victimes en cet an de grâce1938! Un martyre chasse l’autre…
Mais entre tous les peuples assassinés, le Basque seul partage avec son Maître le privilège d’être insulté sur la croix. A ceux de ses adversaires qui le condamnent de bonne foi, nous demandons de lire et de méditer cette nouvelle édition du livre de Victor Montserrat: “Le Drame d’un Peuple Incompris”.
Je n’ai rien à ajouter à cet exposé de faits “qui parlent d’eux-mêmes” comme on dit! Qu’il me soit permis seulement d’attirer l’attention du lecteur catholique sur un point de doctrine: les chrétiens doivent l’obéissance au pouvoir établi, légal, aussi faible et aussi mauvais soit-il; or, tous les ambassadeurs étrangers étaient accrédités auprès du Gouvernement de Madrid.
Pour un catholique, les circonstances peuvent-elles rendre légitime un mouvement insurrectionnel? Nous l’admettons. Après deux ans d’une tuerie atroce, pendant lesquels l’Espagne a été saignée à blanc, ruinée, livrée à des puissances étrangères, utilisée comme cobaye par des aviations rivales, j’admire que des hommes sérieux continuent à professer que l’insurrection militaire était le meilleur parti à prendre, le plus raisonnable, le plus sage et le plus chrétien. Mais enfin, acceptons que la rébellion puisse devenir quelquefois un devoir saint et sacré. Il n’en reste pas moins que le refus de rébellion contre le gouvernement ne saurait, en aucun cas, être reproché à un peuple chrétien. Un partisan catholique du général Franco est obligé de lui chercher des excuses. Un peuple chrétien n’a pas à s’excuser de n’avoir pas voulu se révolter. Et comment le peuple basque l’aurait-il voulu, aurait-il même pu le vouloir? La République allait reconnaître son autonomie dont les militaires étaient les adversaires déterminés.
On ne nous a jamais rien répondu sur ce point parce qu’il n’y a rien à répondre –ou plutôt on a répondu par des calomnies : le peuple basque aurait partie liée avec Moscou avant la révolte militaire. Ici le livre de Victor Montserrat apporte toute la lumière. A peu près seul en Espagne, le clergé basque avait suivi les directions pontificales et opposé aux organisations communistes et anarchistes un syndicalisme catholiques vivants et prospère.
Tout de suite, dès le lendemain de l’insurrection, cette Chrétienté basque a été traitée en ennemie par les rebelles. On ne lui a pas laissé de choix; elle a été précipitée dans la guerre; et dès les premières semaines, elle a eu ses martyrs –ses prêtres martyrs.
Claudel ferait bien d’ajouter à son poème franquiste, un verset en l’honneur de Don Martin Lecuona, de Don Gervasio de Albizu, fusillés à Galarreta, près d’Hernani (Don Lecuona fut le fondateur de la J.O.C. en Euzkadi). Il pourrait aussi honorer la mémoire de Don Alejandro Mendicute, de Don Joaquin Arin, de Don Leonardo de Guridi, de Don José Penagaricano, de Don Celestino de Onaindia (qui mourut en récitant le Te Deum), de Don José de Adarraga, de Don José de Ariztimuno, du Père Roman de San José, prieur d’Amarabieta.
Croyez-vous donc, cher et grand Claudel, qu’il n’y ait eu en Espagne que seize mille martyrs? Vous osez écrire, parlant de ces seize mille:
Les portes du ciel ne suffisent plus à toute cette cohue bon gré mal gré…
Du moins ceux-là furent-ils assassinés par une populace furieuse et aveugle qui ne se réclamait pas du Christ. Des milliers d’êtres humains ont été les cibles d’aviateurs italiens et allemands qui agissaient froidement, sans colère, en service commandé, aux ordres du chef catholique de “l’armée sainte”. C’est une autre sorte d’horreur que celle qui vous inspire ce beau poème incomplet, intitulé Aux Martyrs Espagnols; comme si les martyrs étaient d’un seul côté, les bourreaux d’un seul côté…
Il existe du moins un crime que les plus abjects assassins de Barcelone n’auront pas commis; ils n’ont pas compromis le Christ. Combien d’années, de siècles, faudra-t-il à l’Église d’Espagne pour se dégager de l’effroyable équivoque, et pour que les fils des femmes assassinées à Guernica, à Durango, à Barcelone et dans toute l’Espagne apprennent à ne plus confondre la cause de leur Dieu crucifié avec celle du général Franco?
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A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1938-06-15
Title
A name given to the resource
Le Cruel Martyre du peuple basque
Publisher
An entity responsible for making the resource available
L'Ordre
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
MEL_0549
Source
A related resource from which the described resource is derived
10e année, n°3048, p.1
Creator
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François MAURIAC
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<a href="http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328297236/PUBLIC" target="_blank">Notice bibliographique BnF</a>
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The file format, physical medium, or dimensions of the resource
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Language
A language of the resource
Français
Subject
The topic of the resource
guerre d'Espagne, peuple basque, catholicisme, syndicalisme, martyr
Description
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Préfaçant un livre de Montserrat sur le drame du peuple basque, François Mauriac justifie le refus des Basques de se soulever avec Franco contre le gouvernement légal républicain, et sûr de la foi catholique de ce peuple qui avait suivi les recommandations papales en fondant un syndicalisme catholique, il refuse que les martyrs basque soient exclus, comme le fait <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Paul_Claudel" target="_blank">Paul Claudel</a> du décompte des martyrs de la guerre.
Type
The nature or genre of the resource
Billet
catholicisme
guerre d'Espagne
martyr
Peuple basque
Syndicalisme
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https://mauriac-en-ligne.huma-num.fr/files/original/fc7c80320bc3b545e1e1a1da8a97c7e6.pdf
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Guerre d'Espagne (1936-1939)
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Dans un discours prononcé à Bilbao (1), le ministre de l’Intérieur du gouvernement de Salamanque attaque avec violence Jacques Maritain et la Croix. Il me fait aussi l’honneur de me nommer. Je voudrais, à ce propos, essayer de dissiper quelques équivoques et marquer ma position et celle de mes amis, dans le conflit qui divise l’Espagne.
Mais il faut d’abord avertir le ministre espagnol qu’ici, en France, Jacques Maritain, tendrement aimé de ses amis, est aussi respecté de ses adversaires. Pour beaucoup qui peuvent ne pas entrer dans ses vues sur le Thomisme, ni approuver toutes ses initiatives et toutes ses démarches, il est demeuré, il restera toujours ce “bien-aimé Jacques”, à qui Ernest Psichari écrivait en 1914: “Ce que tu as fait pour moi, les prières par lesquelles tu as fléchi le Bon Dieu, tes paroles persuasives, l’exemple plus persuasif encore de ta vie si noble, si épurée par la Grâce, ta fraternelle affection qui me soutenait constamment dans la voie royale de la vérité, tout cela ne peut être pesé avec les pauvres mesures humaines, il faudra bien que tu en trouves la récompense ailleurs que sur cette terre…”
Jacques Maritain n’est pas un “converti juif”, comme l’assure le ministre de Salamanque. S’il l’était, il ne me paraîtrait pas moins digne d’être admiré et d’être aimé, mais enfin il ne l’est pas. Nous croyons, pourtant, que celle à qui Dieu l’a uni, dut l’aider à devenir ce chrétien exemplaire qui, comme son Maître, ne fait pas acception des personnes, mais vénère dans toute créature une âme rachetée, et sur les visages de toute race, discerne la ressemblance du même Père. II en est plusieurs aujourd’hui, qu’on pourrait croire désespérés, qui savent que rien n’est perdu pour eux tant qu’il existera, dans une maison de Meudon que Dieu habite, cet homme et cette femme dont le regard et la voix leur apportent plus qu’une promesse: la présence visible de la Miséricorde.
* * *
Après ce témoignage rendu à nos amis, je voudrais donner à M. le ministre de l’Intérieur de Salamanque les raisons de notre attitude. Et d’abord, nous avons toujours cru que la pensée du catholique, à l’égard des choses temporelles, reste libre. Comme le disait Gabriel Marcel dans une conférence de Chrétienté: “Un catholique ne peut être obligé en tant que catholique de prendre parti pour tel ou tel clan en guerre contre un autre.” En ce qui me concerne, aux premières nouvelles du soulèvement militaire et des massacres de Barcelone, j’ai d’abord réagi en homme de droite; et de Vichy où je me trouvais alors, je dictai en hâte, par téléphone, cet article sur l’Internationale de la haine, dont quelques lecteurs du Figaro se souviennent peut-être. La présence des Maures, l’intervention massive des escadrilles et des troupes italiennes et allemandes, les méthodes atroces de la guerre totale, appliquées par des chefs militaires à un pauvre peuple qui est leur peuple, les souffrances des Basques coupables du crime de non-rebellion, posèrent aux catholiques français un cas de conscience douloureux. Ils n’ignoraient pas, en effet, que de l’autre côté de la barricade le gouvernement légal était soutenu par les forces conjuguées du marxisme et de l’anarchie.
Ce qui fixa notre attitude, ce fut la prétention des généraux espagnols de mener une guerre sainte, une croisade, d’être les soldats du Christ. Ici, je voudrais qu’on nous comprît enfin. D’aimables confrères ont écrit plaisamment que je regrettais qu’il n’y ait eu que quinze mille prêtres massacrés et que je trouvais que ce n’était pas assez. Parlons sérieusement: les sacrilèges et les crimes commis par une foule armée et furieuse, au lendemain d’une rebellion militaire réprimée, sont d’une horreur insoutenable. Nous disons seulement que les meurtres commis par des Maures qui ont un Sacré-Cœur épinglé à leur burnous, que les épurations systématiques, les cadavres de femmes et d’enfants laissés derrière eux par des aviateurs allemands et italiens au service d’un chef catholique et qui se dit Soldat du Christ, nous disons que c’est là une autre sorte d’horreur, dont vous avez le droit d’être moins frappés que nous ne sommes; mais il ne dépend d’aucun de nous que les conséquences n’en soient redoutables pour la cause qui devrait nous importer par-dessus toutes les autres, et qui est le règne de Dieu sur la terre.
* * *
Que M. le ministre de l’Intérieur n’aille pas croire que nous nous exprimons ici en partisan. Chrétiens, nous n’avons pas à nous faire juges des raisons qui ont pu décider certains de nos frères d’Espagne à prendre les armes contre un gouvernement qu’ils trouvaient injuste. Les conséquences terrifiantes de leur geste, il ne les avait pas toutes prévues. Nous comprenons aussi que l’Épiscopat et le Clergé aient peine à dominer un conflit dans lequel ils se trouvent si tragiquement engagés. Mais il reste ceci, il reste cet épouvantable malheur que pour des millions d’Espagnols, christianisme et fascisme désormais se confondent et qu’ils ne pourront plus haïr l’un sans haïr l’autre.
“Dans les circonstances difficiles où vous vous trouvez, écrivait le Saint-Père à l’Épiscopat mexicain, le 2 février 1926, il est plus que jamais nécessaire, vénérables frères, que vous et votre clergé tout entier, comme aussi les associations catholiques, vous restiez complètement à l’écart de tout parti politique, afin de ne fournir à vos adversaires aucun prétexte pour confondre la Religion avec une faction politique quelconque.”
Et ici, je demande à ceux de nos lecteurs qui nous ont jugés sévèrement, de comprendre les raisons qu’ont les catholiques français, plus que d’autres peut-être, de redouter toute compromission de la cause du Christ avec celle des partis: depuis la Guerre, il s’est passé, dans la France catholique, un événement d’une portée immense et qui échappe aux observateurs du dehors. Les efforts des catholiques sociaux, les initiatives d’un épiscopat d’élite, ami des pauvres et constructeur d’églises, le dévouement d’un des meilleurs clergés qu’il y ait au monde ont porté leur fruit. Il existe une renaissance catholique de la classe ouvrière, il existe un syndicalisme catholique, il existe une jeunesse ouvrière chrétienne.
Des instituteurs et des institutrices de l’État trouvent dans le Christ le principe de leur dévouement aux petits que l’État leur confie . Une poignée dans la masse indifférente ou hostile? Sans doute, mais une poignée de sel: le sel de la terre! Dans les banlieues, des jeunes filles obscures se groupent “pour faire du chrétien”, comme me disait l’autre jour une assistante sociale d’Ivry. Nous ne pouvons décrire ici cette vie souterraine de la Grâce en France, telle que nous l’entrevoyons. Mais quand une dame hitlérienne me souffle, au dessert, que les peuples déliquescents doivent céder la place aux peuples forts, je repasse dans mon cœur les raisons de ma certitude que nous restons, en dépit de l’apparence, le peuple le plus fort, parce que nous sommes toujours, et plus que jamais, le peuple de Dieu.
Que le ministre de Salamanque me comprenne: ce n’est pas au moment où l’effort de tant de générations chrétiennes et de dévouements obscurs aboutit enfin, que sur l’humble plan où il nous est donné d’agir nous allons laisser compromettre l’Évangile. Que l’affreuse loi de la guerre vous ait entraînés à ces épurations dont Bernanos nous a décrit l’horreur dans un livre impérissable, à ces bombardements de villes ouvertes, qu’elle vous ait obligés de subir cette alliance monstrueuse avec le Racisme ennemi de l’Église, aussi redoutable, aussi virulent que le Communisme, encore une fois nous n’avons pas à vous juger ni à vous condamner sur ce point, parce que vos intentions peuvent être droites. Mais nous nous sentons responsables à l’égard de ce peuple fidèle que nous ne sommes pas libres de tromper. Jacques Maritain, en se dressant avec toute la puissance de sa dialectique et tout le feu de sa charité, contre cette prétention des généraux espagnols de mener une guerre sainte, a rendu à l’Église catholique un service dont la fureur qu’il suscite nous aide à mesurer la portée.
Nous ne nous croyons pas infaillibles, mais nous ne cesserons pas d’affirmer ce qui nous semble être vrai, à l’heure où la guerre civile touche peut-être à sa fin; car c’est lorsque tout paraîtra fini que le règne sans partage de la Force commencera. Et la Force qui se sert de l’Église, c’est le plus grand malheur qui puisse fondre sur un peuple chrétien. C’est aussi le plus grand crime, si la parole reste éternellement vraie que répétait au déclin de sa vie le vieil apôtre (celui dont la tête avait reposé sur la poitrine du Seigneur): “Mes bien-aimés, Dieu est amour.”
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Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1938-06-30
Title
A name given to the resource
À propos des massacres d’Espagne – Mise au point
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Le Figaro
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
MEL_0211
Source
A related resource from which the described resource is derived
113e année, n°181, p.1
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
François MAURIAC
Relation
A related resource
<a href="http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34355551z/PUBLIC" target="_blank">Notice bibliographique BnF</a>
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
Pdf
Language
A language of the resource
Français
Subject
The topic of the resource
peuple basque, christianisme, fascisme, catholicisme social, guerre d'Espagne
Description
An account of the resource
Prenant la défense de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Jacques_Maritain" target="_blank">Jacques Maritain</a>, attaqué par le Ministre de l'Intérieur du gouvernement de Franco à Salamanque, François Mauriac revient sur l'histoire de son engagement qu'il justifie par son refus que soient identifiés christianisme et fascisme et plaide en faveur des Basque, croyants fidèles qui avaient fondé un modèle de société fondé sur la renaissance catholique de la classe ouvrière.
Type
The nature or genre of the resource
Chronique
catholicisme social
christianisme
fascisme
guerre d'Espagne
Peuple basque
-
https://mauriac-en-ligne.huma-num.fr/files/original/88d542b75ef4ba618d7661c270ac7a49.pdf
7f3a38823ac7e9bd306451328fbf0a7e
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Title
A name given to the resource
Guerre d'Espagne (1936-1939)
Texte
Ressource textuelle
Text
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Dans la nuit de mardi à mercredi, tandis qu’une rumeur courait la ville: “Blum est lâché par les communistes…” nous étions un petit nombre d’amis groupés autour de trois catholiques basques qui nous parlaient de Bilbao: des rides profondes creusaient leurs jeunes fronts; ces visages bouleversés reflétaient l’horrible bataille. Leurs yeux fixés sur nous, sans colère mais avec une douleur poignante, cherchaient à surprendre notre pensée. Pourquoi cette indifférence de leurs frères catholiques? Pourquoi cette hostilité, cette réprobation?
Je voudrais, sans forcer la voix, me faire l’écho de leur plainte. L’enseignement constant de l’Église catholique a toujours été que nous devons l’obéissance au pouvoir établi. Nul ne saurait nier que le jour où les généraux espagnols entrèrent en action, un gouvernement légitime siégeait à Madrid —ou du moins un gouvernement légal. Même si nous accordons qu’en la circonstance, le peuple basque aurait dû comprendre que l’insurrection devenait tout à coup le plus sacré des devoirs, jamais erreur ne fut plus excusable que la sienne: on n’assassine pas un vieux peuple chrétien parce qu’il a cru qu’il ne fallait pas se révolter.
Le gouvernement légal de l’Espagne a dit aux Basques: “Vous êtes libres.” Cette indépendance dont ils rêvaient depuis des siècles, que les rebelles leur refusaient, et qui enfin leur était légitimement concédée, comment ne l’auraient-ils pas défendue pied à pied, avec cette dure obstination de leur race? (Nous les connaissons depuis l’enfance, nous autres Bordelais, ces petits Basques au front têtu qui jouaient farouchement à la balle contre le mur du préau…)
S’ils ont eu tort, ce n’est pas le lieu de l’examiner ici. Mais s’ils ont commis une faute inexpiable en refusant de livrer à l’Allemagne le minerai de Bilbao, que les Français, du moins, leur soient indulgents. Un jour peut-être nous comprendrons que ce pauvre peuple souffrait et mourait pour nous. Dieu veuille alors que nous ne retrouvions pas leurs morts à l’endroit même où il nous faudra enterrer les nôtres… C’est un crime que de traiter en criminels des héros coupables d’avoir combattu pour cette liberté qu’ils n’avaient même pas prise, qui leur avait été donnée.
Ils ne sont pas les complices de Moscou. Ils n’ont eu de part à aucun des massacres qui ont déshonoré la cause de Barcelone et de Valence. Ils se sont battus chez eux et seuls. Quand on racontera l’histoire de cette guerre, on saura comme ils ont été peu soutenus par Madrid (qui d’ailleurs n’en avait pas les moyens), dans quel abandon ils ont été laissés: sans avions, sans défense antiaérienne: Hitler et Mussolini ont eu beau jeu.
Ce que nous ignorons en France, c’est que les prêtres basques si calomniés, avaient réussi, presque seuls en Espagne, à opposer aux syndicats révolutionnaires communistes et anarchistes, un syndicalisme catholique d’une puissance égale. Nous ne pouvons donner ici des statistiques. Mais nous affirmons qu’une œuvre est en train de s’effondrer, en ce moment même, qui faisait honneur à l’Église d’Espagne, à l’Église catholique tout entière.
Quelle qu’ait pu être leur erreur, ces curés méritent l’indulgence de ceux qui se refusent à les admirer. Durant ces heures tragiques, ils demeurent debout au milieu de leur troupeau décimé. D’ailleurs, Santander la rouge pourrait-elle leur être un refuge? Il leur reste d’attendre ces vainqueurs qui se réclament de Dieu.
Nous essayons de nous rassurer: ce sont des prêtres et l’Église n’abandonne jamais ses prêtres. Elle prend à sa charge l’enfant qui a tout quitté pour se donner à elle. Nous essayons de nous rassurer: nous nous tournons vers le Père commun, vers celui que Sainte-Catherine de Sienne appelait le Christ en terre, vers le Serviteur des serviteurs de Dieu. Nous savons qu’il a fait beaucoup déjà, que beaucoup de vies grâce à lui ont été sauvées… mais qu’est-ce que cela devant la menace d’un massacre légal de prêtres et de fidèles? Le général Franco est, lui aussi, un fidèle. Une seule puissance au monde peut suspendre son bras prêt à s’abattre: celle dont le Royaume n’est pas de ce monde. Ah! cette faible voix qui suffirait à couvrir le fracas des bombes! Et les pelotons d’exécution s’éloigneraient sans avoir tiré; et ce serait Pierre lui-même qui délierait les liens des pauvres prêtres basques coupables d’avoir trop aimé, trop aveuglement aimé, leur terre et leur peuple.
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Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1937-06-17
Title
A name given to the resource
Pour le peuple basque
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Le Figaro
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
MEL_0195
Source
A related resource from which the described resource is derived
112e année, n°168, p.1
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
François MAURIAC
Relation
A related resource
<a href="http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34355551z/PUBLIC" target="_blank">Notice bibliographique BnF</a>
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
Pdf
Language
A language of the resource
Français
Subject
The topic of the resource
Front populaire, guerre d'Espagne, Peuple basque, Liberté, Syndicalisme, Catholicisme, Communisme
Description
An account of the resource
Au moment où <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/L%C3%A9on_Blum" target="_blank">Léon Blum</a> voit sa position menacée par ses alliés communistes, François Mauriac est informé par des amis basques de leur défaite qui s’annonce. François Mauriac déplore le manque de solidarité de la France envers un peuple qui empêchait l’aide économique à l’Allemagne et qui avait construit un modèle de société fondé sur un syndicalisme catholique fort.
Type
The nature or genre of the resource
Chronique
catholicisme
communisme
Front populaire
guerre d'Espagne
Liberté
Peuple basque
Syndicalisme