Un jeune homme d'autrefois
Date : 01/07/1925
Éditeur : Le Divan
Source : 17e année, n°14, p.391-392
Relation : Notice bibliographique BnF
Un jeune homme d'autrefois
Paul Drouot était ce jeune homme d’avant la guerre dont l’espèce semble presque perdue, –sans aucun doute, plus proche d’un Lamartine, d’un Vigny, d’un Maurice de Guérin que les garçons injurieux d’aujourd’hui. Gentillesse de Drouot! Je me rappelle ses manières si nobles, cette courtoisie. Les vedettes d’après-guerre, tous ces jeunes voyous méchants, comment les eût-il jugés? Sans doute eût-il souffert d’être séparé d’eux par tant de grossièreté, par tout ce système de haine. Il en aurait souffert car il appartenait, lui aussi, comme il m’écrivait un jour “au petit nombre de ceux qui sentent vivement et désespérément”.
Bien qu’on ne pût être plus discret, plus secret, l’usure de son jeune visage, ses yeux d’enfant romantique, trahissaient la passion. Nous retrouvons dans ses plus beaux poèmes –Sous le Vocable du Chêne– cette image de l’amour telle que la lui avaient transmise ses maîtres, de Malherbe et de Ronsard à Verlaine, et que Baudelaire et surtout Rimbaud ont décriée. Grande âme, et qui exigeait que l’amour fût à sa mesure:
- Prend mes pauvres mains dans les tiennes
- Et dresse-les vers le soleil!
Et l’Amour en effet a pris ses pauvres mains de soldat, les a dressées après les avoir unies, vers le soleil, vers le ciel.