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La Maison Marbuzet
Roman de Jean Balde

Référence : MEL_0403
Date : 24/10/1934

Éditeur : Le Jour
Source : 2e année, n°296, p.2
Relation : Notice bibliographique BnF

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La Maison Marbuzet
Roman de Jean Balde

Bordeaux nous a vus naître la même année, Jean Balde et moi; le même fleuve traversa notre enfance; les mêmes squares nous ont vus passer, tenant la main de nos mères, et, dans [des] maisons de campagnes pareilles, nous avons entendu des conversations interminables sur cette vigne qui a empoissonné l’existence de nos deux familles.
Je me souviens… Cette jeune fille, d’une force et d’une volonté peu communes, étreignait le réel avec un courage stoïque et chrétien tout ensemble, –bien qu’elle fût merveilleusement douée pour s’en évader. Toujours elle m’est apparue plus forte que les événements: de cette force des vrais poètes qui ne sont vaincus que par Dieu.
Poète d’abord avant d’être romancière, et romancière dans la mesure où elle est poète; ses plus beaux récits jusqu’à ce jour (selon mon goût): “La Vigne et la maison”, “Le Goéland”, “La Touffe de Gui”, marquent bien les étapes de son épanouissement: elle est passée de la connaissance de sa terre natale à l’intelligence de plus en plus approfondie des êtres que cette terre nourrit. Dans son dernier roman, “La Maison Marbuzet”[1], les humains, bien que tenant par de fortes racines au Bordelais, se détachent du sol et prennent une signification universelle. Où Jean Balde a-t-elle rencontré la dure Berthe Marbuzet? Et cette Line redoutable? Au vrai, quand on a connu la jeune fille poète depuis son adolescence, il n’est pas difficile d’imaginer ce qu’elle a pu souffrir d’une certaine humanité d’après la guerre… Mais justement! ce qui la heurte, ce qui la “frappe” au sens littéral, trouve en elle un peintre puissant. La première partie de “La Maison Marbuzet” est, de ce point de vue, d’une âpreté magnifique.
Et sans doute telles de ses premières héroïnes où nous la reconnaissions, où elle avait mis beaucoup de son cœur, nous touchaient davantage: comment ne pas préférer, à la cruelle antiquaire de son dernier roman, les créatures pleines de pureté et de force, du type de Reine d’Arbieux, avec leur noblesse, mais aussi leur exigence… avec cette tendresse, mais aussi cette volonté?... Pourtant, peut-être convient-t-il d’admirer surtout Jean Balde dans ces créations où plus rien d’elle-même apparaît.
Car nul n’a su fixer comme cette vigneronne de la Tresne les types de la bourgeoisie bordelaise et girondine, mais en demeurant toujours en deçà de la férocité. Elle aime tant sa Gironde et ses Girondins! C’est grâce à sa poésie surtout qu’elle leur a témoigné cet amour: après ceux d’André Lafon, nul doute qu’elle ait écrit dans un recueil trop peu connu: “Mausolées”, les plus beaux vers inspirés par notre fleuve et par les tombes qui le regardent couler vers l’Océan.
Chère Jean Balde, un de ceux qui survit à tant de frères endormis et à qui sont échus les lauriers officiels qu’auraient dû cueillir les compagnons aimés de notre jeunesse vous envoie, à ce bel endroit de votre noble et pure carrière, ce signe d’admiration, de confiance et d’amitié.

Notes et références

  1. Plon, éditeur

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François MAURIAC, “La Maison Marbuzet
Roman de Jean Balde,” Mauriac en ligne, consulté le 25 avril 2024, https://mauriac-en-ligne.huma-num.fr/items/show/403.

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  1. BnF_Le Jour_1934_10_24.pdf