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Le Vieux Pirouge

Référence : MEL_0410
Date : 04/04/1914

Éditeur : Le Journal de Clichy
Source : 8e année, n°493, p.1
Relation : Notice bibliographique BnF

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Le Vieux Pirouge

Quel est, dans Clichy, cet homme plein d’humilité qui s’injure lui-même en se traitant de Vieux Pirouge? Chaque semaine il relève les faits qui dans le monde entier lui paraissent propres à faire douter de l’existence de Dieu et de la vérité du catholicisme. Pauvre Pirgouge! De cette chasse il revient souvent bredouille, que sa déconvenue même rend témoignage à la Vérité. La semaine dernière, il avait trouvé contre le bon Dieu un raz de marée et un écroulement d’église. Aujourd’hui, il ne découvre rien que la perte du procès de l’abbé Lemire devant un tribunal ecclésiastique. Vieux Pirouge, vous êtes, en dépit de vous-même, un confesseur de la foi et dans votre présence à Clichy, je discerne aisément le doigt de Dieu. Mais je veux vous enseigner une manière plus simple de servir le catholicisme. Au lieu de relater des tremblements de terre, dites à vos lecteurs le nombre de vieillards hospitalisés par les Petites sœurs des Pauvres. Renseignez-les sur les religieuses dominicaines qui sont les gardes-malade gratuites de l’ouvrier. Parlez-leur des écoles chrétiennes de l’Orient et des services qu’elles rendent à la France ou bien encore traitez devant eux du renouveau catholique. Racontez la conversion d’un Huysmans, par exemple. Parlez-leur du laboratoire de l’Institut catholique où Branly continue ses expériences sur la télégraphie sans fil. Entretenez-les des récentes enquêtes auprès de la jeunesse intellectuelle chaque jour orientée un peu plus vers le catholicisme. Mais ce que vous ne pourrez jamais dire à vos lecteurs, vieux Pirouge, sous cette rubrique Le doigt de Dieu c’est toutes les âmes consolées par la messe du matin et par la communion, tout ce que l’amour du Christ suscite dans l’humanité d’immolations que personne au monde ne connaît… Vous qui reprochez à Dieu des raz de marée, je crains que vous ne connaissiez pas le rôle auguste de la souffrance dans le monde –que vous ne sachiez pas qu’un des plus grands bienfaits du christianisme est d’avoir donné un sens à la douleur humaine– mais cela, je vous l’expliquerai un jour, vieux Pirouge, car vous m’êtes sympathique. Je ne discerne pas en vous cette suffisance d’un Moitet, qu’aucune métaphysique n’inquiète et qui ne voit pas plus loin que le bout de sa férule. Je préfère votre haine à sa feinte modération.

[F. S.]

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F. S. (pseudonyme de François Mauriac), “Le Vieux Pirouge,” Mauriac en ligne, consulté le 19 avril 2024, https://mauriac-en-ligne.huma-num.fr/items/show/410.

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  1. BnF_Journal de Clichy_1914_04_04_1.pdf