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Allocution de M. Fr. Mauriac

Référence : MEL_0748
Date : 25/02/1910

Éditeur : Revue Montalembert
Source : 3e année, n°18, p.130-131
Relation : Notice bibliographique BnF

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Allocution de M. Fr. Mauriac

Monseigneur,

C'est avec la plus grande joie et la plus légitime fierté, qu'au nom de tous mes camarades, j'ai l'honneur de souhaiter la bienvenue à votre Grandeur dans cette maison. En daignant venir parmi nous, elle nous donne la meilleure preuve de l'intérêt tout. paternel qu'elle nous porte, et que l’importance de notre œuvre ne lui a pas échappé.
Dans cette ville de Paris que Dieu confia à votre Grandeur, il est un quartier auquel elle doit songer plus souvent avec une sollicitude inquiète. C’est le quartier latin où de toutes les villes et de toutes les campagnes de France affluent tant de jeunes hommes. Ils y arrivent avec de grands espoirs et grands rêves. Ils partent comme les héros de Balzac à la conquête de Paris. Mais dès le premier soir, dans leur triste chambre d’étudiant, ils se heurtent à la pire ennemie de leur jeunesse et de leur âme: la solitude. Hélas! on a toujours raison de dire que c’est une mauvaise conseillère, et Dieu sait tous les jeunes cœurs qu'elle a tués!
Monseigneur, Votre Grandeur peut s'en rendre compte: Aujourd'hui, ceux à qui Dieu par une grâce singulière ouvrit cette maison, ne connaissent pas la solitude. Ils se retrouvent ici, représentant à peu près toutes les sciences humaines: avocats, médecins, architectes, poètes, électriciens, et il y a une telle abondance d'étudiants en pharmacie, qu'ils forment un petit état dans l'état, sous le nom de Conférence Pasteur! Mais il ne suffit pas à ces jeunes gens de se défendre contre le mal –ils s'arment pour la défense de la vérité. Ils apprennent dans cette maison, à l'école d'un illustre écrivain catholique M. Georges Goyau, à souffrir véritablement des iniquités sociales. Et ce n'est pas d'ailleurs en écoutant de belles conférences, que le désir leur est venu de les soulager: disciples du Saint-Vincent de Paul, ils connaissent la mélancolie des quartiers ouvriers, ils montent souvent des escaliers sordides, ils passent obscurément leurs après-midi de Dimanche dans les Patronages de banlieue, ils ont d'humbles amis parmi les plus pauvres, –et c'est ainsi qu'ils ont voulu eux aussi, dans la mesure de leur force, chercher un remède à tant de misères imméritées.
Et s'il apparait à Votre Grandeur que tout cela nécessite une vie religieuse intense, je lui rappellerai que beaucoup de ces jeunes gens vont tous les ans passer quelques jours, très loin de Paris, dans le recueillement d'une maison de campagne. Ils y trouvent le silence, troublé seulement par la voix du prêtre, qui en de brèves méditations, les met en face des vérités éternelles. Et comme il arrive dans ces retraites où nous faisons taire la voix du monde, c'est celle de Dieu qui s'élève dans le silence de notre cœur. Tels sont, Monseigneur, ces jeunes gens qui vous reçoivent aujourd'hui avec tant de joie. A l'heure où beaucoup de Français ne peuvent plus estimer des maîtres indignes, ils se rattachent passionnément à la seule autorité qui leur reste: celle du Souverain Pontife à Rome et celle de celui qui, dans ce diocèse, représente pour eux plus particulièrement Jésus-Christ. Et voici que dans la foule qui le suit, ce chef a bien voulu remarquer notre petit troupeau. Il a daigné lui apporter le réconfort de sa présence, l'encouragement de sa parole... Et c'est pourquoi il y a dans nos cœurs, pour Votre Grandeur, une reconnaissance infinie –et j'ose le dire, tout le respect et toute l'affection que des enfants peuvent éprouver pour le père le plus vénéré el le plus aimé.

Monseigneur remercie notre président et nous redit sa vive satisfaction de se trouver au milieu de nous. Puis, dans un entretien familier, Sa Grandeur nous parle de nos devoirs, de nos responsabilités, des espérances que l’on met en nous. C’est le Père qui encourage et exhorte à se donner, à se dévouer, à se créer des amis parmi les pauvres. Il y eut, en cet instant, des résolutions renouvelées, des hésitations vaincues…

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François MAURIAC, “Allocution de M. Fr. Mauriac,” Mauriac en ligne, consulté le 19 avril 2024, https://mauriac-en-ligne.huma-num.fr/items/show/748.

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  1. BnF_Revue Montalembert_1910_02_25_1.pdf