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Notes sur quelques livres de poésie

Référence : MEL_0751
Date : 25/05/1910

Éditeur : Revue Montalembert
Source : 3e année, n°21, p.365-366
Relation : Notice bibliographique BnF

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Notes sur quelques livres de poésie

V. B. Chardonnal: Pitiés et révoltes, Poèmes.
A. De Riberolles: La Ronde des idées (édition de la Revue des Poètes).
J. R. de Brousse: La Maison sur la colline (Id.).
W. Chapman: Les Rayons du nord (Id.).
Fernand Richard: Le Christ (Plon).
André Lamandé: La vie ardente (Jouve).

Le livre de M. Chardonnal est dédié à Christ le grand rêveur de la fraternité humaine, aux aspirations prolétariennes vers un meilleur devenir, –aux ouvriers de l'idée émancipatrice– à tous les efforts socialistes de bonne volonté. La traite des blanches, le désastre de Courrières, le petit Maurice qui eut les jambes broyées par un tramway, inspirent à M. V. B. Chardonnal des vers que F. Coppée aurait peut-être aimés. On ne saurait nier qu'une belle âme généreuse et canclide s'exprime dans ces cris de révolte et de pitié.
La Ronde des idées de M. de Riberolles contient d'aimables poésies dont quelques-unes ont tout le mérite des pièces de circonstance (sur un bal de l'Opéra, pour le mariage de ma sœur, pour la fiancée de mon frère, etc.). Parmi quelques vers d'amour d'une précieuse tristesse, je recueille cette définition mélancolique:

... tous les vieux mots d'amour usés comme ces dalles
Que trop de pélerins baisèrent, en passant ...

La Maison sur la colline de M. J. R. de Brousse abrite une simple vie de poète classique, peuplée d'amitiés fidèles et d'un pur amour.
Je ne veux retenir des Rayons du nord de M. W. Chapman que la noble et sincère fidélité à la France qui s'y exprime –quelquefois avec assez de bonheur.
M. Fernand Richard a cru devoir mettre en vers –toujours solides– les récits évangéliques. Je n'oserais affirmer qu'ils y ont beaucoup gagné. Mais comme il faut le louer de n'avoir pas étranglé la parole divine dans le carcan du vers classique, et de ne l'avoir que pieusement et simplement rythmée! Les dernières pages consacrées au Christ éternel sont d'une étonnante puissance verbale et d'une noble inspiration...

Depuis dix-neuf cents ans, depuis le jour unique
Où, sur terre, des jours nouveaux furent comptés
Après quatre mille ans d'attente prophétique;
O Christ, depuis cette heure où la pensée antique
Vit l'erreur affolée et prise de panique
En face de la Croix, et de la Vérité;
Les sceptiques ont dit: “Va, ta chute est prochaine,
Beau rêveur doux et blond qu'on a pris pour un Dieu”....

Je parlerai plus longuement ailleurs du nouveau poème d'André Lamandé, La vie ardente. Ce livre respire, si j'ose dire, la santé. A. Lamandé ne s'attarde pas à nous confier les vaines mélancolies, les tristesses sans cause, les émotions ténues de chaque jour. Son poème ne séduira guère les âmes déçues, les cœurs désenchantés, ni tous ceux qui exigent de la poésie qu'elle exprime, mieux qu'ils ne le pourraient faire, leur pauvre existence tourmentée. Il plaira aux esprits sains qui travaillent dans la joie, la certitude et la paix.

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François MAURIAC, “Notes sur quelques livres de poésie,” Mauriac en ligne, consulté le 20 avril 2024, https://mauriac-en-ligne.huma-num.fr/items/show/751.

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  1. BnF_Revue Montalembert_1910_05_25_2.pdf