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A bas les radicaux !

BnF_Journal de Clichy_1914_04_18.pdf

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M. Moitet nous accuse d’être “sortis de l’Université”. Tout le monde ne peut pas être instituteur primaire, M. Moitet. Vous jugez plus facile de nous appeler Camelot du Roi que de nous parler –comme je vous en conjure depuis trois semaines– de Monis, de Rochette et de Caillaux. Ce parti pris de silence, mon pauvre Moitet, constitue la plus lourde accusation contre vos chefs. Hé bien! écoutez-moi: Vos élèves sont en vacances et vous avez des loisirs. Dans votre classe déserte et silencieuse, livrez-vous à une étude approfondie des splendeurs radicales. Relisez les journaux parus au lendemain d’Agadir.
Racontez-nous la [démission] de de Selves, ministre des Affaires étrangères, qui ne voulut pas être complice de la trahison. Rappelez-nous le réquisitoire écrasant de Pichon contre Caillaux et ce mot de l’un des vôtres, à propos des agissements de Caillaux. “Cela relève de la Haute-Cour… De la nouvelle flétrissure qui vient d’atteindre notre chef, je vous permets de ne rien dire: les plus indifférents n’ont pu oublier encore ni ce sang ni cette boue”.
Mais vous vous obstinez à ne point nous livrer le fond de votre pensée touchant la loi de trois ans, ô profond tacticien d’école laïque! A toute autre époque, les citoyens de Clichy ne seraient guère flattés d’être représentés à la Chambre par un instituteur d’Asnières. Or, ce représentant aujourd’hui, ne serait pas qu’un incapable, il serait un danger national: les plus petites microbes ne sont pas les moins dangereux et cet homme obscur peut décider, par son vote, du retour à la loi de deux ans. C’est-à-dire que nous reviendrions aux chiffres de 1913: nous ne pourrions plus opposer que 520 000 hommes à 860 000 allemands. Tous les sophismes viennent se briser contre cette effrayante réalité.
M. Moitet peut déclarer avec suffisance qu’il ne croit pas à la guerre, il y a dans Clichy assez de braves gens qui ont le ruban vert de 1870 et la médaille militaire pour lui donner un démenti et lui raconter l’invasion.
Une majorité de Moitels à la Chambre? Mais ce seraient les fourriers de l’invasion allemande. Et si M. Moitet décide que personne en Europe ne songe à nous attaquer, méditons ces chiffres d’une éloquence terrible: L’Allemagne a voté en un an et demi trois milliards pour son armée et sa marine.
Mais tout cela n’intéresse guère M. Moitet. Ce qui le passionne, c’est l’approche des élections, c’est l’espoir de quitter ses bambins d’Asnières pour un auditoire plus digne de son éloquence et de ses idées générales –c’est d’échanger son traitement d’instituteur contre quinze mille francs… Quel rêve! Il en parle dans son dernier article avec le plus émouvant lyrisme. Il compare le Pouvoir à “une barque enchantée qui mène vers les jouissances matérielles et morales” Il s’agit bien de la France! Il s’agit que quelques centaines de sous-vétérinaires, comme les appelait Gambetta, voguent vers des jouissances matérielles et immorales.

[François Sturel]

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