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L'espérance de la terre

BnF_Temps présent_1944_12_22.pdf

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A chaque Noël, au long de ces guerres qui ne savent plus comment finir, nous avons de nouveaux motifs pour admirer que rien ne vienne à bout de l’espérance humaine. Si dans les décombres du Havre, de Caen ou de Varsovie, un petit garçon possède encore des santons en une crèche, l’homme-enfant doit regarder son Dieu-enfant avec la même ferveur émerveillée que dans notre monde d’autrefois qui ne semblait pas voué au meurtre. Nous savons aujourd’hui que c’est cette communion de l’enfant éternel et de l’enfant éphémère, alors que nous avions à peine commencé de vivre, qui nous a prémunis à jamais contre le désespoir.
A peine fûmes-nous parvenus à la vie consciente qu’aux approches de Noël, une vague prodigieuse d’espérance nous souleva. Comment se rappeler, sans en être attendri, cet écolier chétif qui, pour mieux entendre le bourdon de la cathédrale, ouvrait sa fenêtre à l’haleine glacée de la nuit et cherchait les anges dans la brume?
Et toutes les nations de la terre espéreront en son nom…” En dépit des exécutions et des meurtres des villes éventrées ou anéanties, des peuples déportés, des hommes par centaines de milliers arrachés aux femmes et enfermés ensemble pendant des années, en dépit des camps de torture, de cette profanation atroce des âmes et des corps, en dépit de toutes les méthodes pour dégrader la créature et pour avilir l’esprit humain, les nations continuent de tressaillir d’espérance dans le Sauveur.
La France sait déjà qu’elle a eu raison d’espérer. Elle qui se souvient du dernier Noël dans l’asservissement et dans la honte, elle prie, ce soir, pour ses fusillés qui ne sont pas morts en vain, pour ses prisonniers et ses déportés, pour les garçons déguenillés et sans souliers du front de l’Ouest, pour les soldats des Vosges et de Maurienne, mourants de froid et dont ce n’est jamais le tour d’être relevés. Que les morts dorment en paix, que les vivants souffrant en paix, dans cette paix promise par les anges, puisque la France est redevenue une nation libre.

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