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L’Internationale de la haine

GALLICA_Le Figaro_1936_07_25.pdf

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Nous qui sommes nés entre les Pyrénées et la Garonne, Gascon, Béarnais, Basque, nous qui avons presque tous du sang d’Espagne dans les veines et dont l’enfance fut bercée d’un patois mêlé d’espagnol, nous ne pouvons nous résigner à ce que nos frères d’au delà des montagnes tombent sous des balles françaises.
Quand je dis nos frères, je ne pense pas seulement aux fascistes, aux royalistes. Notre horreur serait la même si la France fournissait d’avions et de mitrailleuses un dictateur aux prises avec les masses ouvrières.
Hier soir, devant la photographie de deux garçons de Barcelone étendus la bouche contre le pavé, nous nous sentions bouleversés jusqu’aux larmes sans chercher à savoir s’il s’agissait de républicains ou de rebelles. Mais qu’eussent été notre douleur et notre honte si un ami espagnol avait été en droit de nous crier: “Ces deux enfants sont peut-être des victimes de M. Blum.”
Il faut que le président du Conseil le sache: nous sommes ici quelques-uns à essayer de remonter le courant de haine qui emporte les Français; depuis l’avènement du Front populaire, nous nous sommes efforcés à la modération. Dans une atmosphère de guerre civile, nous avons voulu “raison garder”. Mais s’il était prouvé que nos maîtres collaborent activement au massacre dans la Péninsule, alors nous saurions que la France est gouvernée non par des hommes d’Etat, mais par des chefs de bande, soumis aux ordres de ce qu’il faut bien appeler: l’Internationale de la Haine. Nous saurons que le président du Conseil d’aujourd’hui n’a rien oublié de la rancune séculaire qui tenait aux entrailles le partisan Léon Blum.
Un tel geste risquerait de jeter les plus sages dans le parti des violents. Chacun est libre de juger selon sa conscience le pronunciamiento. Pour mon compte, reprenant le mot de Mme de Sévigné, sur Bajazet, j’avoue que je n’entre pas dans la raison de ces grandes tueries que rien à mes yeux ne légitime.
Je ne m’en sens que plus libre d’envelopper du même amour, sans distinction de parti, Navarrais et Castillans, Catalans et Andalous.
Nous ne voulons pas qu’une seule goutte de sang espagnol soit versée par la faute de la France. L’Espagne est indivisible dans notre cœur: celle du Cid, de sainte Thérèse, de saint Jean de La Croix, celle de Colomb et de Cervantès, du Gréco et de Goya.
Et je crois être l’interprète d’une foule immense appartenant à tous les partis, de la Guyenne et de la Gascogne au Béarn et au Pays basque, en criant à M. Léon Blum qui brûle d’intervenir, qui, peut-être, est déjà intervenu dans ce massacre: “Faites attention, nous ne vous pardonnerions jamais ce crime.”

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